Auteur Martine Hermant
BABELIO AVIS DES LECTEURS
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4e de couverture
Alors que l’avenir s’annonce sous les meilleurs auspices pour Estéban, avec ses promesses de réussite professionnelle et des projets de mariage, celui-ci ne parvient pas à s’y engager avec sérénité, entravé depuis l’enfance par un sentiment d’irréalité. Marianne, son ancienne amante, va lui révéler le secret de ses origines avant de l’aider à explorer sa seconde nature. Estéban parviendra-t-il à déterminer où se situe pour lui le meilleur choix ?
Ce petit roman atypique, qui associe la fin d’un amour à une initiation au passage de la réalité au rêve, plaira à tous ceux dont la personnalité ne se satisfait pas des contingences ordinaires de la vie et espèrent, après quelque apparition de la licorne, tenter le sortilège du Feth Fiada.
Extrait
Chapitre I
Prémices
« Le cerf […] je l’ai vu l’autre jour […] Et il avait une étoile d’or qui brillait au milieu de sa poitrine ; tout autour d’elle, c’était comme des fléchettes d’or, et cela brillait, Dieu ! C’était trop beau à voir. […] je me suis mis à genoux pour l’adorer. Voilà. Alors, il m’a tourné le dos et partit. Et moi je l’ai suivi en courant. C’est vrai. Oh ! J’ai tant couru - il se retournait et me regardait dans les yeux, comme pour m’appeler. Et voilà ce que je vais vous dire : nous sommes arrivés à un grand taillis, les arbres étaient bleus, la mousse était bleue, tout était bleu. Et sur la mousse j’ai vu la fleur rouge qui pousse là tous les dix ans. Elle est plus rouge que la fleur des blés, et haute comme un lis. Et si belle que j’ai fermé les yeux. »
Zoé Oldenbourg
Argile et cendres
La montagne est transfigurée par la lumière nouvelle. Un dégradé de verts mordorés égratigne la blancheur de la neige, au profit de l’herbe impatiente de reconquérir la place.
Estéban se sent parfaitement bien après la longue marche qui l’a apaisé, conscient d’avoir atteint un état d’intégration à la nature environnante proche de la symbiose. Son corps, sensiblement vivant, s’accorde à la matière et son esprit, libéré de toute contrainte, fusionne avec l’harmonie de l’instant.
Il est reconnaissant à cette liberté de lui permettre d’échapper aux difficultés incessantes de son existence, ce mal de vivre qui l’empêtre depuis l’enfance dans ses contradictions. Une souffrance latente l’isole des rapports humains en lui donnant l’impression d’être différent sans qu’il ne sache précisément où se situe la rupture.
À tout considérer, il se situe pourtant dans une des meilleures phases de sa vie. Un nouvel amour - les précédents s’étant terminés en désastre - lui permet d’espérer se stabiliser dans une relation de couple qu’il a toujours enviée autour de lui. Les albums pour enfant dont il est l’auteur se vendent bien et lui assurent un quotidien satisfaisant. Il se croit également parvenu à cet âge où, la première jeunesse passée, l’acceptation de soi est prête à s’affirmer.
Pourquoi, alors, n’éprouve-t-il pas le sentiment de vivre intensément en dehors de ces moments de solitude en pleine montagne ?
Par la suite, il pensera que ce fut à cet instant précis où il perçut avec acuité le changement de saison, qu’il s’engagea vers une nouvelle possibilité de connaissance. Une mutation tout en douceur, sans changement extraordinaire. À l’instar de l’hiver prêt à relâcher son emprise sur le paysage, une infime barrière commence à dégeler en lui pour l’éveiller à une perception différente de ce qu’il a toujours appréhendé.
Quiconque l’observant à ce moment-là, debout sur l’aplomb d’un rocher, son corps long et musclé tendu vers l’espace ouvert, cheveux livrés au vent et profil christique levant le bleu profond de son regard en réflexion de l’azur du ciel, n’aurait pas manqué d’être saisi d’une évocation anachronique avec quelque portrait romantique d’une beauté singulière, dont il parait lui-même totalement inconscient1.
1 - L’auteur, pour avoir bien connu Estéban, demande qu’on lui pardonne cet excès de lyrisme.
