Auteur : Soeur Anne Élisabeth - Communauté des Diaconnesses de Reuilly
Cet ouvrage a obtenu le Prix Grellet de La Deyte décerné le 10 décembre 2014
par l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Clermont-Ferrand
Cet ouvrage a également été récompencé par le PRIX NOS RACINES D'AUVERGNE 2016 décerné par le Cercle littéraire de Catherine de Médicis
PRÉSENTATION
Les « Petites sœurs des campagnes » en Haute-Loire, ont une bien longue histoire (...) pensez donc « 300 ans » une histoire riche s’il en est.
Au cœur des hameaux sont nées celles qu’on appellerait plus tard « les béates ». Institutrices avant l’école laïque, gratuite et obligatoire de Jules Ferry,
elles enseignaient aux enfants en journée, les rudiments de la lecture, de l’écriture et du calcul. En soirée elles tenaient ouvroir pour les jeunes filles et les femmes,
la dentelle du Puy étant à l’époque le gagne-pain de ces populations pauvres.
Pour accueillir la béate les habitants construiront une « maison d’assemblée » avec une cloche qui rythmera la vie quotidienne.
Volume 1
Découvrons dans l’arrondissement d’Yssingeaux 303 hameaux et
faisons mémoire des quelques 77 hameaux qui ont accueilli une béate.
Volume 2
Découvrons 277 hameaux dans les cantons d’Allègre, Fay sur Lignon, Loudes, Le Puy Nord-Ouest,
Saint Julien Chapteuil, Saint Paulien et Vorey
et faisons mémoire des quelques 66 hameaux qui ont accueilli une béate.
RÉSUMÉ Sommaire des Volumes 1 et 2
PRÉFACE
INTRODUCTION
ARRONDISSEMENT D’YSSINGEAUX
Liste alphabétique des villages de l’arrondissement d’Yssingeaux
Canton de Bas en Basset
Canton de Monistrol sur Loire
Canton de Montfaucon
Canton de Saint Didier la Séauve
Canton de Tence
Canton d’Yssingeaux
ARRONDISSEMENT DU PUY-EN-VELAY (1ère partie)
Liste alphabétique des villages de l’arrondissement
du Puy-en-Velay
Canton d’Allègre
Canton de Fay le Froid
Canton de Loudes
Canton du Puy Nord-Ouest
Canton de Saint Julien Chapteuil
Canton de Saint Paulien
Canton de Vorey
ANNEXES
CONCLUSION
Lexique
Bibliographie
PRÉFACE
« Les béates et les maisons d’assemblée, dans le département de la Haute-Loire, contribution à un inventaire régional », cet ouvrage magistral et monumental doit attirer le lecteur pour ses multiples centres d’intérêt.
Tout d’abord, il retrace l’histoire des Filles de l’Instruction, appelées au XIXe siècle les « Béates » qui se confond avec l’histoire de l’Instruction dans plusieurs départements du Sud, notamment la Haute-Loire. L’auteur, Sœur Anne Élisabeth de la Communauté
des Diaconesses de Reuilly, a ciblé sans aucun doute le département le plus représentatif et signe ainsi une page importante de l’histoire régionale.
Le lecteur, averti ou non averti, découvrira tous les outils réunis avec une rigueur exemplaire pour comprendre cette « épopée » de femmes qui ont consacré leur vie aux autres, d’abord dans le registre de l’éducation, mais aussi dans celui de l’assistance aux personnes avec un dévouement total.
Histoire de l’Éducation, histoire régionale, histoire de femmes hissées aux premiers rôles dans des villages et hameaux souvent coupés du monde, histoire humaine puisque l’auteur a pris le temps d’écouter les habitants. Et aussi histoire des lieux avec une dimension patrimoniale incontestable avec la mise en valeur de ce petit patrimoine de village ou de hameau qui est ainsi inventorié et peut-être sauvé de l’oubli. La citation de Dom Helder Camara, évêque brésilien (1909-1999), mise en exergue, confirme cette dimension : « Réserve toujours un regard de fraternelle sympathie pour les petites gares où les grands trains ne s’arrêtent qu’exceptionnellement ».
L’introduction nous initie au sujet. L’essentiel est dit clairement, suscitant la curiosité pour suivre ensuite nos béates de hameau en hameau, de village en village.
La béate n’est pas une religieuse, mais relève de la Communauté des Demoiselles de l’Instruction du Puy pour la grande majorité.
Tout remonte à Anne-Marie Martel (1644-1673), qui enseigna le catéchisme à des jeunes filles et des femmes du faubourg Saint-Laurent au Puy, mettant en route une œuvre : « la communauté des Demoiselles de l’Instruction » et dépendant de cette Communauté, les « Filles de l’Instruction » ou béates, qui dureront près de 300 ans. L’auteur s’est intéressé prudemment aux béates après 1789, quand le principe est bien fixé. On ignore d’ailleurs l’origine du mot « béates » apparu au XIXe siècle.
Les béates sont originaires des villages ou des hameaux ; elles sont formées pendant deux ans de noviciat à la maison mère des Demoiselles. On leur apprend à lire (elles doivent être capables de lire des sermons comme ceux de Massillon), à écrire pour aider par exemple les paysans, et des rudiments de calcul pour faciliter les transactions des femmes pour leurs dentelles avec les colporteurs. Elles obtiennent une lettre d’obédience ou un Certificat d’Aptitude et doivent effectuer une déclaration d’ouverture dans le village où elles vont enseigner. Parfois, elles changent de lieu.
Leur mission consiste à réunir les enfants, filles et garçons, à qui elles apprennent aussi ces rudiments. Elles réunissent encore les fillettes, les jeunes filles, les femmes, notamment les dentellières. Elles soignent les malades et assistent les mourants.
C’est dans la maison d’assemblée qu’ont lieu les réunions, une maison située au cœur du village et construite par les habitants qui, en général, font la demande d’une béate à la communauté du Puy. Le plus souvent, une maison nouvelle est construite avec un plan récurrent, une salle en bas, qui sert de classe et à l’étage, le logement de la béate, avec toujours une cloche pour appeler les enfants. Ces maisons sont toujours étroitement liées aux activités du village, du communal à proximité du lavoir, des bassins, du four à pain ou de la croix.
Cet état de fait fonctionnera presque parfaitement, en dépit d’insatisfactions récurrentes, jusqu’aux lois de Jules Ferry. Celui-ci déclare le 18 mars 1879 que les béates sont vieilles, qu’elles n’ont pas de diplômes, qu’elles ne tiennent pas d’écoles, mais des ouvroirs. Elles seront prises dans l’éternelle tourmente de l’opposition laïque-religieux. Des défenseurs se lèveront pour témoigner en leur faveur, ainsi la lettre que nous pouvons lire dans l’ouvrage, publiée par le Moniteur de la Loire le 3 avril 1879 adressée au ministre et qui oppose l’hôtel somptueux du ministre et ses 60000 francs par an à ces « saintes femmes » qui donnent l’instruction élémentaire à des milliers de petits enfants pour 100 à 250 francs qu’elles redonnent aux pauvres. Certaines résisteront et feront même de la prison pour enseignement illicite. Certaines accepteront de passer dans le nouveau système comme Marthe Roiron, sœur Flavie de l’Instruction du Puy, aux Cayres en 1881. D’autres continueront de manière plus ou moins clandestine. Les maisons d’assemblée seront souvent utilisés pour les nouvelles écoles et nombreux sont les documents relatant la séparation désormais à respecter entre religion et laïcité. Une autre époque avait débuté.
Le déclin était donc inéluctable. La dernière des béates en Haute-Loire, Marie Cubizolles, mourra en 1977 à l’âge de 92 ans.
L’ouvrage recense 723 villages qui sont classés par arrondissements et cantons, une liste alphabétique permettant une utilisation simple. L’histoire des béates est ainsi déclinée dans chaque notice de village ou de hameau, notice construite de manière très rigoureuse avec plan cadastral, photos (datées), documents divers très exhaustifs (copies de registres, atlas de 1810, procès- verbaux etc…). La qualité des illustrations quelles qu’elles soient contribue encore à gratifier le lecteur d’une documentation hors pair dont l’éventail couvre largement le champ de la recherche. Les archives diverses ont livré les noms des béates et quelques éléments de leur vie. Certaines habitent chez leurs parents, certaines sont reconnues pour la qualité de leur enseignement, d’autres au contraire sont fortement critiquées. Nous y trouvons une mine de renseignements tout à fait extraordinaires, non seulement sur ce petit patrimoine qui fait l’essence de nos villages, maisons traditionnelles, pérennes ou vétustes…, mais surtout à propos de ces femmes qui ont cultivé et tissé sans bruit mais avec grande efficacité, bien avant que politiques et médias ne s’en emparent comme d’une idée géniale, le lien social. Des femmes qui savaient ce que veut dire réellement l’expression si galvaudée le « vivre ensemble ». Les funérailles de sœur Madeleine Roudon à Sarlis en 1901 en témoigne : des funérailles « simples comme l’avait été sa vie : peu de couronnes, peu de discours et pas un personnage officiel à son convoi, mais en revanche beaucoup de gens de Ceveyrac et de Sarlis qui témoignaient ainsi de leur reconnaissance pour tous les services rendus… »
Avec cet ouvrage, le lecteur pourra entamer à son tour de jolies promenades en sillonnant la Haute-Loire, comme l’a fait inlassablement Sœur Anne Élisabeth pendant 20 ans. 20 ans qui ne furent pas seulement consacrés à une observation des sites par un œil infaillible, mais aussi à la rencontre des ultimes témoins de l’aventure ou de leurs descendants. Que celle-ci soit remerciée pour ce travail de mémoire et de racines qui donnent à l’histoire toute sa valeur et son pouvoir de transmission éminemment indispensable.
Anne Courtillé †
Professeur honoraire d’Histoire de l’Art, Université Blaise Pascal
