Auteur : Janine NOUSCHI
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Dans « le Nautile et autres Nouvelles », Janine Nouschi nous entraîne dans un univers fantastique. Dans le décor de la grande bourgeoisie niçoise, des histoires de femmes sont mises en scène à travers des situations, des phénomènes, des comportements étranges et inexplicables. Monde irrationnel, phénomènes paranormaux ou bien seulement créations de subconscients surmenés ? À vous de choisir...
Enquête policière ou introspection ? La passion de Mathieu pour la peinture le pousse à regarder sa vie à travers les tableaux qu'il aime. Le regard qu'il porte sur les choses qui l'entourent et sur Anne sa femme n'est-il pas en dehors de la réalité ? Aussi est-ce pour obtenir une reconnaissance aux yeux de son mari que la jeune femme va soudainement se transformer et se mettre à dessiner un objet qui lui était jusqu'à présent inconnu ? D'où vient cette force intérieure qui la pousse à parfaire sans relâche.
Beau masque - Maléfique - Bénéfique - Excentrique - Chimérique. Un long serpent gris descend d'un bac de la terrasse, il forme un créneau lorsqu'il passe le rebord de la fenêtre, il glisse sur les tomettes avec un bruissement de taffetas puis, sa tête se dresse le long du lit. La bête glisse sur le mur et s'approche du perroquet qui dort les paupières closes et le bec entr'ouvert. Le naja tourne autour du bec, Pierre l'aide à se glisser sous les yeux, le serpent fait une boucle de son corps puis il plaque sa tête en médaillon, sous la tiare. Les paupières de l'oiseau battent, les yeux enflent, jaillissent, l'iris se dilate, noir, et le bec muselé par le serpent, violace et se referme.
EXTRAIT
- Et si on allait passer quelques jours en Belgique ? C'est la Semaine des Antiquaires d'Anvers. Qu'en dis-tu ? Mathieu savait qu'Anne faisait semblant de lire le journal qu'elle avait déployé devant son visage, les pages font un bruit agaçant quand on les tourne et le jeune homme s'était assoupi dans le silence de la chambre. Anne se cachait pour pleurer.
- A quelle heure partons-nous ? lui répondit-elle, en se mouchant.
Le paysage de Paris à Bruxelles est inintéressant. Plus on va vers le nord, plus la terre est humide. Des dermes sans caractère, entourées d'arbres grêles, détruites par les guerres et toujours reconstruites, des terres labourées pointillées d'oiseaux au plumage noir. Des rus qui débordent, une atmosphère gorgée d'eau, un horizon plat mais déjà le ciel plus grand qu'ailleurs annonce que l'air et l'eau, en Hollande, se confondront dans une même liquidité. Au loin les cheminées et les usines des villes industrieuses.
Pour dormir, ils s'arrêtèrent à Bruxelles. Ils ne connaissaient pas cette capitale, ils la trouvèrent sans unité, sans harmonie. L'ensemble des Palais et des Musées les étonna par leur ampleur. Ils descendirent les escaliers qui mènent vers la Vielle Ville et burent une bière dans la "Maison des Meuniers". Ils admirèrent la Grand-Place, ils s'extasièrent devant l'architecture du quinzième siècle et les façades des différentes corporations, chatoiement d'or dans des pierres brunies. Des négociants avaient vécu dans ces intérieurs cossus, leur demeure comme leur ameublement étaient raffinés sans la prétention des intérieurs italiens. ils avaient travaillé, ils surent amasser mais restèrent accessibles. Les quartiers modernes, disparates, les déçurent, ils s'étonnèrent devant la fameuse Avenue Louise, en fait, une autoroute bordée de riches magasins et de boutiques snobs. Et pourtant quel charme dans les restaurants et quel accueil sympathique chez les commerçants, même s'ils n'achetaient rien, les vendeurs leur souhaitaient de passer une bonne journée avec une telle conviction qu'on sentait leur affabilité naturelle. Mathieu imitait leur accent : "Madame, je vous fais bonsoir." Le lendemain matin, ils reprirent le train pour Anvers. La Semaine des Antiquaires ouvrait.