Auteur : Pascale BLAZY
Éditions DU ROURE
Ce titre à remporté le Prix des Écrivains Catedraticos en 2021
BABELIO AVIS DES LECTEURS
... Jusqu'à la lie
C'est ce qu'à juré Némésis lorsqu'elle a trempé les lèvres dans la coupe de la vengeance.
Aller jusqu'au bout.
Quand le lieutenant Jules Morel arrive à Boudes, il est bien loin de se douter des boulversements qui vont agiter sa paisible existence.
Cette enquête, qui débute avec l'assassinat d'un vigneron, prendra vite des allures de crimes en série et retentira bien au-delà de l'Auvergne.
EXTRAIT
Avertissement
Si d'aventure, une personne ou un fait vous semblait familier,
ce serait chose fortuite. Toute cette histoire est le fruit de mon imagination.
Bonne lecture.
Alignées sur le tissu sombre, les trois lames brillaient.
Némésis avait sorti de son sac les liasses de billets qu'elle avait tendues au coutelier.
Tandis qu'il comptait, elle furetait dans la pièce.
Dès son entrée dans l'atelier, une douce quiétude l'avait envahie, envolée la boule de stress qui nouait son estomac durant le trajet.
Le feu s'en allait mourant dans le ventre de la forge. Parmi les marteaux rangés du plus petit au plus grand, elle en choisit un, le soupesa. Ni trop lourd, ni trop léger, juste comme il faut.
Quand elle l'eut bien en main, elle s'avança à pas légers, se plaça derrière l'artiste trop occupé pour se soucier d'elle. Levant son bras armé, elle l'abattit avec force sur le crâne de l'homme.
Un seul coup suffit à l'assommer, son corps bascula sur le côté.
Alors mécaniquement, Némésis remit les billets dans son sac, roula les lames dans le tissu et les y rangea avant de tirer la fermeture éclair.
Le coutelier bougea faiblement.
Sans hésiter, elle reprit le marteau et le frappa à nouveau.
Ensuite, elle fila à l'extérieur, déposa le sac sur le perron, prit le jerrican d'essence qu'elle avait apporté.
En partant du fond de la pièce, Némésis versa le liquide inflammable, traçant des chemins qui convergeaient vers la sortie. Elle prit soin de bien faire le tour du corps de l'artiste.
Quand elle eut gagné le seuil, elle quitta ses gants, les lança au centre de l'atelier, sortit de sa poche un briquet et une feuille de papier qu'elle embrasa.
Timide, la flamme quitta la feuille jetée sur le sol, fila en se multipliant. Bientôt, elles furent partout.
Némésis recula, saisit son sac et se retrancha sous la ramure.
Maintenant, le feu ronflait dans la maison comme dans un âtre gigantesque. Les vitres des fenêtres qui avaient explosé, apportaient un léger courant d'air, attisant le brasier. Quelques flammes hardies tentaient de lécher les tuiles. Une plus gourmande y parvint, aussitôt suivies par ses sœurs. Certaines avaient, sans doute, été plus téméraires ou plus rapides : au fond de la maison, la toiture s'effondrait déjà. À la réflexion, elles avaient été mieux nourries, c'était là qu'étaient rangés les produits inflammables.
Les mains dans les poches de son manteau, adossée contre un arbre, Némésis se délectait du spectacle. Les lueurs fauves de l'incendie dansaient sous ses paupières mi-closes, franchissant par intermittence la frange de ses longs cils.
L'odeur âcre du brasier emplissait ses narines, irritant sa gorge, lui tirant des larmes. Fascinée par la magie du feu, parfaitement immobile, elle respirait à petits coups.
Lorsque l'embrasement fut total, elle regagna sa voiture et partit.
